Comprendre les mécanismes de la restructuration de la dette d’une entreprise et savoir comment restructurer cet endettement est une compétence-clé pour le manager de l'entreprise. Et pas seulement quand la situation économique est tendue. On vous explique !
Entre 2010 et 2020, l’endettement des entreprises non financières n’a cessé d’augmenter. Avec la crise du Covid, les besoins de financement des entreprises ont fortement augmenté. Et ne sont pas nombreuses celles qui ont la chance d'avoir des prêts garantis! C’est dire combien il est primordiale de pouvoir prendre la décision de restructurer ses dettes.
Quelles options pour les PME face à des difficultés financières ?
Tout d’abord, le manager restructure la dette pour alléger son remboursement, le cas échéant dans le traitement ou l’anticipation de difficultés de trésorerie
En cas d’insuffisance de flux de trésorerie d’activité, un manager peut négocier l’allongement de la durée de remboursement de la dette existante pour réduire le montant des annuités ;
Il peut se donner des marges de manœuvre en mobilisant des actifs. L’opération de cession-bail (sales and lease-back) permet de résoudre une difficulté de trésorerie et/ou de financement MLT (moyen-long terme). Cette opération consiste à vendre une immobilisation à un établissement de crédit et à mettre en place un contrat de crédit-bail sur cet actif. L’entreprise obtient ainsi des liquidités qu’elle n’aurait pas pu obtenir par d’autres moyens. Elle continue d’utiliser l’actif et bénéfice d’une option de rachat à terme. L’imposition de la plus-value de cession pouvait parfois dissuader de réaliser cette opération. Mais la loi de finance supprime ce frein. Elle réintroduit la possibilité pour les entreprises d’étaler l’imposition de la plus-value de cession sur la durée du financement, ce qui assure la neutralité fiscale de l’opération.
Un manager doit aussi anticiper le mur de la dette. Il peut renégocier dans de meilleures conditions avant la date d’échéance. Une des modalités de cette anticipation est de transformer un emprunt in fine en emprunt remboursable sur plusieurs années. Il sera également possible dans la phase d’amortissement d’intégrer une nouvelle période d’un an où seuls les intérêts ; en restant dans une durée totale de prêt de 6 ans.
Pourquoi restructurer la dette de son entreprise hors difficultés financières ?
Les difficultés financières ne constituent toutefois pas le seul motif qui incite le manager à restructurer la dette :
En période de taux bas, un manager peut souhaiter réduire le coût de son endettement pour améliorer son résultat financier, y compris en l’absence de difficultés de remboursement. Si le coût d’endettement actuel est plus faible que le coût des emprunts existants, il convient que le différentiel de taux fasse plus que compenser d’éventuelles pénalités de remboursement anticipé.
Il peut également vouloir mutualiser les divers emprunts existants pour en faciliter la gestion. Soit en créant un syndicat bancaire qui centralise la relation avec l’entreprise, soit en substituant plusieurs contrats que l’on rembourse par anticipation par un seul contrat. Dans ce dernier cas, il faudra prévoir de négocier d’éventuelles pénalités de remboursement anticipé.
Les restructurations de dettes n’ont souvent pas qu’un seul motif
Des opérations de restructuration de la dette peuvent combiner plusieurs des motivations citées ci-dessus :
Exemple 1 : D’une part, l’entreprise négocie un allongement de la durée de remboursement de la dette existante. D’autre part, elle contracte un nouvel emprunt permettant de financer un programme d’investissement. Résultat : la nouvelle annuité représente un montant identique à la précédente.
Exemple 2 : Une entreprise avec une situation financière saine prévoit un grand programme d’investissement. Elle intègre ses banques existantes dans un syndicat et négocie une nouvelle dette. Cette dernière remboursera les dettes précédentes avec une maturité allongée et des conditions de taux plus favorables en termes de marge.
Quels points d’attention dans la négociation de la restructuration ?
Le manager doit être attentif, dans la renégociation aux demandes de garantie de la banque :
Apports de comptes courants d’associés assortis d’une convention de blocage ;
Niveaux de trésorerie minimum à maintenir en termes de placements auprès de la banque du prêt, par exemple, un niveau de placement minimum fixe auprès de la banque en contrepartie d’un prêt MT ;
Engagements prévus dans les covenants, c’est-à-dire les niveaux de ratios à atteindre sur certains indicateurs : capacité de remboursement (Endettement net / Ebitda), ratio gearing (Endettement net / capitaux propres), frais financiers / Ebitda, taux de distribution en dividendes. Le non-respect du niveau attendu sur le ratio pouvant entraîner l’exigibilité immédiate du prêt (clause de défaut croisé, infra);
Engagements de faire et de ne pas faire, par exemple, l’obligation de demander l’autorisation de la banque avant de procéder à un nouvel investissement ou de souscrire un nouvel emprunt au-delà d’un certain seuil ;
Clauses de défaut croisé prévoyant la déchéance du terme de l’emprunt et son exigibilité immédiate en cas de non-respect d’une obligation de l’emprunteur.
Le manager doit, préalablement à toute restructuration de dette, construire une prévision financière à MLT avec un scénario central, et un scénario dégradé. Ces scénarios lui permettront de s’assurer de la capacité de l’entreprise à respecter les engagements demandés par la banque, notamment les ratios ou covenants.
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